► La réaction européenne est-elle à la hauteur des attaques contre la zone euro et les Etats membres ?
1) L’Europe était face à un double défi : elle devait faire preuve de sa solidarité politique et de sa solidité économique
§ Face cette crise financière, la plus grave que l’euro ait connu depuis sa création et à l’heure où l’Europe est au pied du mur, il fallait organiser la riposte, prendre des décisions urgentes et apporter une réponse politique à la hauteur des enjeux : assurer la stabilité et l’unité de la zone euro et envoyer un signal très fort aux marchés dès lundi matin.
§ Sous l’impulsion déterminante de la France et de l’Allemagne, un plan de stabilisation massif a été adopté (total de 750 Mds €)
a) Tous les Etats membres se sont mis d’accord pour apporter leur garantie à hauteur de 440 milliards d’euros si un Etat est en difficulté pour se refinancer : c’est un moyen de siffler la fin de la partie pour tous ceux qui spéculaient contre certains Etats ou qui renchérissaient trop les taux.
b) la Commission européenne prend toute sa part dans ce plan avec un fonds de stabilisation de 60 Mds euros. Cela vaut dire que c’est l’UE, en tant qu’entité propre qui empruntera pour prêter en cas de besoin à un Etat membre.
c) le FMI intervient quant à lui à hauteur de 250 Mds €, sous forme de prêts en cas de besoin.
d) enfin, la BCE intervient sur les marchés obligataires pour en garantir la liquidité.
§ A ce stade, il ne s’agit que de garanties, mais c’est un message très fort en direction des marchés : message d’unité, de solidarité et de solidité. Et les moyens mis sur la table sont de nature à restaurer la confiance des investisseurs.
2) Mais au delà des mesures d’urgences, il faudra aller plus loin et tirer toutes les leçons de cette crise. Il faut se doter d’un véritable gouvernement économique avec des principes essentiels : le renforcement de la surveillance économique et de la coordination des politiques économiques dans la zone euro ; la révision du Pacte de stabilité et de croissance pour renforcer les sanctions en cas de manquement répété aux règles ; la mise en place d'un mécanisme de management de crise pour l'avenir.
3) Enfin, cette crise doit nous inciter plus que jamais à réduire nos dépenses et à avoir une gestion rigoureuse de nos finances publiques. Tous les Etats européens sont confrontés à cela. On peut toujours discuter sur le mot « rigueur », cela ne change en rien la réalité.
La rigueur, ce n’est pas forcément un gros mot, c’est même plutôt une qualité à partir du moment où cela consiste à évaluer l’efficacité des dépenses, à prioriser ses dépenses et surtout à supprimer toutes celles qui ne sont pas utiles ou pas efficaces.
Gérer son budget avec rigueur, c’est ce que fait une entreprise, c’est ce que fait un ménage. On a cru que les Etats pouvaient vivre éternellement au-dessus de leurs moyens. La crise grecque nous prouve le contraire !
Et la rigueur, cela ne veut pas dire automatiquement des hausses d’impôts. Faisons d’abord à fond ce travail de réforme (retraites, fusion des CG et des CR), ce travail de baisse des dépenses (non remplacement d’un départ sur 2 dans la fonction publique et ses satellites) et donnons nous des gardes-fous efficaces (règle constitutionnelle). Et une fois que tout cela aura été fait, au bout du bout, on pourra regarder si des ajustements fiscaux sont nécessaires !
Commencer par augmenter les impôts n’aurait aucun sens : cela ne ferait que reporter le problème en faisant payer les Français et cela casserait la reprise !
► Le plan en faveur de la Grèce est-il suffisant ?
1) D’abord, il faut rappeler que les Etats membres devaient intervenir pour aider la Grèce à se sauver !
La Grèce fait partie de la zone euro et les risques d’affaiblissement de notre monnaie, voire de contagion à nos économies ou à d’autres Etats, justifiaient cette intervention. Il ne faut pas être naïf : lorsque la Grèce est attaquée par des opérations spéculatives, c’est notre système financier qui est attaqué et au final nos entreprises et nos emplois. On avait tous intérêt à aider la Grèce, parce lorsqu’on aide la Grèce, on aide l’Europe, on aide la France.
Notre message aux marchés et aux spéculateurs est clair : attaquer n’importe quel Etat membre, c’est attaquer notre monnaie et donc tous les Etats de la zone euro !
2) L’Europe l’a bien compris et la réaction est à la hauteur de l’enjeu :
§ C’est un plan sans précédent (ce sont les 110 Mds €, dont 80 Mds € que les pays de l’Eurogroupe ont décidé de mobiliser pour aider la Grèce sur 3 ans) qui a été adopté à l’unanimité dimanche par les pays de la zone euro, en lien avec le FMI.
§ Ce plan exceptionnel c’est la réponse de l’Europe à la situation exceptionnelle que traverse actuellement la Grèce qui ne parvient plus à accéder aux marchés financiers pour se financer. Ce plan concrétise le principe de solidarité qui avait été posé dès le mois de février à l’initiative notamment de la France. Son objectif est clair : mettre un coup d’arrêt à la spéculation et assurer la stabilité de la zone euro dans son ensemble
§ Cet exercice de solidarité ne se limite pas aux seuls Etats : tous les ministres de l’Eurogroupe sont également tombés d’accord pour voir, dans leur pays respectif, avec les représentants des secteurs bancaires quelles contributions les banques pourraient apporter.
3) Nous avons pris nos responsabilités en étant solidaire de la Grèce, pour autant cette solidarité n’exclut pas l’exigence!
§ En contrepartie de cette aide, la Grèce a présenté un plan d’économies certes très dur, mais indispensable pour rétablir la confiance, redresser ses finances publiques et réduire, dès cette année, le déficit public de 4 points de PIB. Elle s’est également engagée à poursuivre cet effort en 2011 et 2012 pour ramener le déficit public sous le seuil de 3 points de PIB d’ici 2014.
§ Nous veillerons à ce que les engagements de la Grèce soient scrupuleusement respectés. Ce sera tout le rôle de la Commission européenne et du FMI. Les décaissements seront d’ailleurs conditionnés au respect du programme convenu :
ð Ramener le déficit budgétaire de 13.6% en 2009 à 8.11% en 2010 et 6.5% en 2012 pour atteindre 2.4% en 2014.
ð Gel des salaires des fonctionnaires jusqu’en 2014.
ð Suppression des 13 et 14ème mois des traitements des fonctionnaires.
ð Hausse de l’âge légal de départ à la retraite : aucun départ à la retraite ne sera autorisé avant 60 ans.
ð Majoration de la TVA de 2%.
ð Nouvelle taxe de 10% sur l’alcool.
§ Enfin, qu’une chose soit claire : il ne s’agit en aucun cas d’un cadeau à la Grèce mais d’un dispositif exceptionnel pour préserver la stabilité financière de la zone euro. Ce prêt, c’est donnant-donnant. Nous prêtons, pour 3 ans, à un taux très proche de ceux du FMI. Bien évidemment, il ne s’agit pas non plus de gagner de l’argent sur le dos de la Grèce, mais de garantir la crédibilité de ce plan de soutien en incitant la Grèce à retourner sur les marchés le plus rapidement possible.
► Tout risque de contagion aux autres pays de l’UE est-il écarté ?
Il ne faut pas tout mélanger. La situation des autres pays européens n’a rien à voir avec celle de la Grèce. La crise que traverse aujourd’hui ce pays est due à l’ampleur de son déficit et de sa dette mais également au fait qu’elle ait suscité la méfiance en cachant la situation réelle des ses finances publiques. C’est un cas tout à fait particulier.
Pour ce qui est du Portugal et de l’Espagne, la situation est là aussi très différente. Rien n’autorise à remettre en question la crédibilité ou la soutenabilité de leurs finances publiques. Ces pays sont tout simplement victimes d’une crise spéculative déclenchée à l’occasion de la crise grecque.
Quand à la France, les Français n’ont aucune raison de s’inquiéter :
§ Dans ce genre de périodes, les investisseurs se réfugient plutôt vers les émetteurs dont la signature est la meilleure. C’est le cas de la France qui a su conserver, grâce à la politique responsable menée par le Gouvernement pendant la crise, sa signature et donc la confiance des marchés.
§ Les choix faits par le Gouvernement ont permis à notre pays de mieux résister que ses principaux partenaires : la récession a été beaucoup moins brutale en France que dans les autres pays de l’OCDE et, en 2010 et en 2011, les organisations internationales nous placent nettement au-dessus de la zone euro en termes de croissance.
§ Nos derniers chiffres de déficit pour 2009 ont été inférieurs à nos propres prévisions, grâce à une politique de maîtrise des dépenses publiques efficace, basée sur le gel des dépenses de l’Etat en volume et la réduction des effectifs des fonctionnaires. Cette politique sera confirmée lors de la deuxième session de la conférence sur les déficits publics qui se tiendra au mois de mai. Nous sommes déterminés à poursuivre les réformes structurelles dont notre pays a besoin pour garder la qualité de sa signature et augmenter son potentiel de croissance.