Astrid Baud-Roche, conseillère régionale de Haute-Savoie, porte parole de l’UMP sur la lutte contre les discriminations.
Vous trouverez ci-dessous mon intervention.
Le vote de l’UMP sera l’abstention.
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« Lutter contre les discrimination et se battre pour l’égalité des chances est un combat que nous menons tous, du moins presque tous. C’est un combat républicain profondément ancré dans l’identité de notre pays et de notre région.
C’est le combat que mènent jour après jour de nombreuses associations partout dans notre région.
C’est le combat que mènent de nombreux élus dans diverses collectivités. C’est même un combat que mène avec détermination notre gouvernement.
C’est aussi le combat que mène la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, voulu par le Président de la République.
L’égalité des chances, ce n’est pas un combat qui va de soi. C’est une conception exigeante de la justice sociale et du rôle de l’Etat que beaucoup d’autres pays ne partagent pas.
L’égalité des chances est une cause qui peut rassembler une population.
La France n’est pas la France lorsque l’égalité entre les citoyens est bafouée chaque jour par des discriminations intolérables.
Malheureusement, en tant que citoyens, nous ne pouvons que constater que notre pays ne parvient pas suffisamment à regarder cette diversité en face.
Notre société a du mal à faire place aux différences, à les considérer comme une richesse, et comme une chance.
- Nous ne pouvons plus tolérer qu’un jeune couple se voie refuser un appartement qu’il est parfaitement en mesure de payer, simplement à cause de son nom.
- Nous ne pouvons plus accepter que de jeunes diplômés, motivés et qualifiés, n’arrivent pas à décrocher un emploi à cause de la couleur de leur peau.
- Nous ne pouvons accepter que des jeunes passent à côté d’une embauche à cause de leur adresse.
- Nous ne pouvons tolérer qu’une jeune femme soit moins payer qu’un homme avec la même qualification, parce qu’elle est une femme. et que sous ce prétexte on lui accorde moins de responsabilité parce qu’elle peut faire le choix d’avoir un enfant.
- Comme on ne peut accepter une société qui n’est pas capable de faire une place aux personnes handicapées.
- Nous ne pouvons accepter qu’une personne soit rejetée parce qu’elle est homosexuelle, ou parce qu’elle porte une kipa, ou va à la messe le dimanche, ou prie le vendredi.
- Comme nous ne pouvons tolérer les préjugés parce qu’une personne milite dans un parti politique, ou dans un syndicat, ou parce qu’elle a une activité associative.
Ces réalités quotidiennes, dont certains ici sont eux-mêmes victimes, sont une injure à notre pacte républicain, aux valeurs humaines les plus fondamentales. Elles sont même un danger pour notre démocratie.
Une société où les discrimination ne sont pas combattues, c’est une société dans laquelle la peur et le repli risquent d’avoir le dernier mot. Une société qui a peur est une société qui perd sa vitalité et son dynamisme.
Faire changer les regards, les mentalités, les comportements : voilà l’objectif de la lutte contre les discriminations.
Et dans ce combat nous avons besoin de tous.
- Nous avons conscience du travail des associations. Un travail indispensable, car elles sont au plus près du terrain, à l’écoute de nos concitoyens. Nous savons combien cela exige de dévouement, de temps et d’énergie. Et l’on peut les remercier, car malgré les difficultés, elles ne baissent jamais les bras. Et nous avons besoins d’elles pour que personne ne songe à relâcher les efforts dans la promotion de l’égalité des chances. Car elles le savent mieux que quiconque, rien n’est jamais acquis dans ce domaine.
- On peut noter l’action de diverses fédérations professionnelles, de syndicats du patronat. Grâce à eux, aussi les choses sont en train de changer dans les entreprises, qui font de plus en plus de place à la diversité dans leurs recrutements. On a pour preuve le nombre croissant des signataires de la charte de la diversité. Plus de 1500 entreprises à ce jour.
- Ont peut noter aussi les expériences dans certaines grandes écoles, des écoles de service publics où des jeunes issus des quartiers populaires accèdent enfin aux formations d’excellence.
Le monde change. C’est nécessaire. L’égalité des chances avance. Mais il reste beaucoup à faire.
Faire changer les regards, les mentalités, les comportements : voilà l’objectif de la lutte contre les discriminations.
Voilà l’objectif que doit remplir votre délibération de ce jour.
Et je dois avouer que fasse à l’enjeu je vous trouve très politiquement correcte. Pas assez ambitieux. Votre délibération est fade, et parfois même maladroite.
Vous nous proposez dans un premier point de vous autoriser à signer une charte proposée en annexe. Cette charte est louable. Si sur le fond nous n’avons rien à redire, sur la forme c’est tout autre chose. Et il aurait été de bon ton de ne pas faire preuve, une fois de plus, de discrimination à l’encontre de votre opposition, pour que l’on puisse y travailler ensemble. Pour, tout simplement, une plus grande efficacité et compréhension. Nous aurions aimé apporter notre contribution à cette charte pour la rendre encore plus efficiente, sans modifier les réflexions et les apports des jeunes rhonalpins.
- Tout d’abord le titre de cette charte nous paraît maladroit. En effet, il propose une approche négative de la problématique, à notre sens non productive. « Lutter contre » n’est pas l’essentiel à valoriser. Ce qu’il faut faire passer comme message c’est une attitude positive comme « promouvoir ». On aurait donc pu l’appeler « Charte de la promotion de la liberté et de l’égalité ».
- En introduction de cette charte, il aurait été bien de faire un rappelle de nos libertés fondamentales. Parce que les discriminations nient les fondamentaux que sont la liberté de conscience, la liberté d’opinion, la liberté de religion, la liberté d’expression, l’égalité des hommes et l’égalité des sexes. Tout est dit ici en une phrase.
- Ensuite, dans le premier point de cette charte, vous n’abordez pas la xénophobie. La xénophobie, appelons un chat un chat, elle a son importance comme phénomène psychosociologique de peur et de rejet de l'étranger. Elle est sous
jacente au phénomène de discrimination. C'est à ce niveau qu'il paraît aussi nécessaire d'intervenir dans le changement des mentalités, des représentations sociales et culturelles et par conséquent des pratiques individuelles et collectives.
- Toujours dans le premier point de l’engagement régional, il nous semble maladroit de préciser « antisémitisme » d’emblée dans le titre de cet article, compte tenu qu’il s’agit d’une discrimination religieuse parmi d’autres qui s’inscrit sous un volet général des discriminations liées aux convictions religieuses précisées plus loin dans ce premier point. Le fait de mettre en gras ce point précis peut avoir l’effet inverse escompté du fait qu’il semble exclure les autres convictions religieuses ou les laisser paraître moins importantes. Certains pourraient juger cette précision discriminatoire.
- Enfin dans ce 1er point toujours, il nous semble important d’aborder la question de la discrimination territoriale. Elle est une réalité. Un jeune d’un quartier qui souffre d’une mauvaise réputation a plus de mal à trouver un emploi qu’un jeune d’un quartier plus tranquille. Cette discrimination territoriale vaut aussi pour la jeunesse rurale qui souffre de problèmes, qui sont des freins incontestables à l’insertion professionnelle.
- Dans le 3èm point de cette charte, vous nous parlez de former, sensibiliser et informer sur les obligations légales. Il nous paraît important d’ajouter une notion de prévention partant du principe que le racisme, ou la xénophobie sont souvent le fruit de la méconnaissance de l’autre et donc de la peur de ce qui est différent. Il est essentiel de mettre en parallèle la prévention et la curatif.
- J’en reviens à la nécessité de travailler tous ensemble. Dans votre point 4, vous évoquez la possibilité d’ouvrir les comités de suivi de l’aide aux projets des jeunes à des représentants d’association. Très bien. En plus cela vous fait un peu de pub au passage. Mais n’oubliez de vous appuyer sur le réseau très riche des Missions Locales, même dans ce genre de comité.
- Aussi, il est étrange de remarquer, et c’est symptomatique, que vous faites le moins possible, voir presque pas référence à ce qui peut exister au niveau de l’Etat Français, voir européen.
C’est une folie de faire croire que vous êtes seul dans ce combat.
L’Europe est très engagée par diverses politiques dans l’égalité des chances.
La HALDES, Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité fait également beaucoup de choses. Dans le volet jeunesse de votre délibération, vous évoquez la mise en place d’une veille, avec un comité de pilotage….. mais ce genre de chose existe avec la HALDES.
Le plan de cohésion sociale va aussi dans le même sens, avec entre autre le PACTE. D’ailleurs sur ce point, il est étrange de constater que se sont les collectivités de gauches qui en ont le moins signé. Mais c’est un dispositif d’Etat, ceci explique peut être cela. Mais vous nous annoncez page 581 que vous allez enfin faire des PACTE….il vous aura fallu 2 ans pour vous y mettre.
- Page 581, vous nous parlez de votre plan handicap. Mais il y a aussi la loi de 2005 sur le handicap.
- Aussi dans votre volet formation, vous nous dites que les CTEF vont impulser des choses…. Mais soutenez déjà ce qui existe.
- Dans le point 5, alinéa 3, vous évoquez une communication envers les stagiaires et les apprentis. Vous pouvez aussi ajouter les lycéens. C’est un peu de notre compétence.
- Enfin, vous êtes malin car vous précisez que vous imposerez dans les contrats d’objectifs que vous avez avec les structures d’accueil, d’information et d’orientation, ainsi que dans les CFA, une obligation de moyens spécifiques pour mettre en place votre politique de lutte contre les discriminations. Ce dispositif est judicieux, cependant vous ne pouvez exiger une obligation de moyens de la part de ses structures, entre autres des missions locales, sans les doter d’une contribution financière complémentaire. Vous allez faire faire aux autres, comme cela ça vous coûtera moins.
Vous voyez, si on avait travaillé ensemble, on aurait pu faire mieux, pour le bien de tous.
Enfin, une bonne politique est celle qui a une bonne stratégie. Et une stratégie est bonne, lorsqu’elle se base sur un diagnostic, pas seulement du ressenti ; lorsqu’elle fixe un plan d’action clair ; lorsqu’elle a un budget, et nous ne pouvons que constater que vous nous annoncez aucun chiffre ; enfin elle doit se fixer des objectifs clairs avec un calendrier, ce qui n’est pas le cas.
Je dirais, tout ça pour ça.
J’aurais aimé vous féliciter pour la qualité de votre délibération, pour sa variété, son originalité. J’aurais aimé vous féliciter pour avoir su fédérer les énergies de tous les groupes politiques de cette assemblée, sans discrimination, pour proposer une politique ambitieuse.
Vous auriez pu ainsi montrer à nos jeunes et à l’ensemble des rhonalpins, que nous étions capables de changer les choses lorsque nous sommes capables de travailler ensemble dans une même direction.
Ainsi vous auriez pu montrer que notre Région a du courage, de la détermination, de l’imagination et de la générosité à revendre.
Malheureusement, c’est tout l’inverse. »