Les conséquences de la crise sanitaire sur les Missions Locales font l’objet d’une enquête flash de la Dares, publiée lundi 15 juin 2020. Celle-ci révèle que les Missions Locales étaient "fermées aux deux tiers" mais que le contact avec les jeunes s’est majoritairement maintenu. Les entrées en Pacea ou Garantie jeunes ont chuté mais les parcours entamés avant le confinement ont globalement pu se poursuivre. L’utilisation des moyens de communication à distance a favorisé le maintien du contact avec les jeunes mais a également été source de difficultés. Cette enquête a été réalisée en concertation avec la DGEFP et l'UNML.
72% des Missions Locales ont indiqué avoir utilisé plus souvent les SMS qu'avant la crise. (Dares, enquête flash Covid Missions Locales, mai 2020)
La Dares a réalisé une enquête flash auprès des Missions Locales, publiée ce lundi 15 juin 2020. Le terrain de cette enquête a été conduit du 13 au 20 mai via un questionnaire en ligne, réalisé après concertation avec la DGEFP et l’UNML. Près de la moitié des Missions Locales ont répondu au questionnaire. Les données d’enquête ont ensuite été redressées.
Deux tiers ont complètement fermé les lieux d’accueil
Les deux tiers des Missions Locales ont complètement fermé leurs lieux d’accueil pendant le confinement, souligne l’étude. Le dernier tiers a accueilli uniquement le public en situation d’urgence. 95% des Missions Locales avaient au moins la moitié de leurs agents en télétravail. Le télétravail concernait au moins 80 % des agents pour trois Missions Locales sur quatre. Certaines agences déclarent que tous les agents disponibles n’ont pas pu travailler, et cela principalement pour des problèmes techniques en lien avec le télétravail, en particulier des problèmes de connexion. "Une Mission Locale sur deux arrive à rester en contact avec plus de 80 % des jeunes suivis", précise la Dares. À l’inverse, seule une Mission Locale sur dix n’a pu maintenir le contact qu’avec 10 à 50 % des jeunes suivis. Le contact avec les jeunes a été plus facilement maintenu dans les Missions Locales où les conseillers étaient le plus disponibles, c’est-à-dire où les effectifs en arrêt maladie ou garde d’enfants étaient moins nombreux.
Forte diminution des entrées en dispositif
Le document met en avant une "forte diminution des entrées en dispositif mais un large maintien des parcours d’insertion entamés avant le confinement". 95 % des Missions Locales ont accueilli, physiquement ou à distance, moins de nouveaux jeunes que d’habitude. Parmi elles, 10 % n’ont accueilli aucun jeune.
Le nombre d’entrées dans les différents dispositifs d’insertion a été "fortement" touché par la crise : 84 % des Missions Locales ne recensent aucune entrée en Garantie jeunes, et les autres en recensent moins que d’habitude. Des entrées en Pacea ont été enregistrées mais "dans une moindre mesure" : elles ont diminué pour 83 % des Missions Locales et n’ont pas pu avoir lieu pour 6 % d’entre elles. Dans 62 % des Missions Locales, aucun jeune n’a pu entrer en formation pendant le confinement. Dans les autres, le nombre d’entrées en formation a diminué par rapport à la situation avant le confinement.
Les Garantie jeunes et Pacea en cours n’ont "le plus souvent" pas été interrompus prématurément à cause de la crise : seules 8 % des Missions Locales ont été concernées par des interruptions de Pacea, et 5 % par des interruptions de Garantie jeunes. De plus, dans la majorité des Missions Locales, les dispositifs d’insertion ont pu être prolongés pour les jeunes entrés avant le confinement : c’est le cas pour respectivement la moitié des Missions Locales pour le Pacea et pour trois quarts d’entre elles pour la Garantie jeunes.
En revanche, dans près de la moitié des Missions Locales, à la fois les PMSMP (Périodes de mise en situation en milieu professionnel), les formations, et les autres dispositifs prescrits par la mission locale ou par les partenaires ont été interrompus pendant le confinement. Ainsi, les trois quarts des Missions Locales ont écourté au moins une partie des formations prévues.
Des emplois dans les secteurs en tension pendant la crise
Dans cette période particulière qu’a été le confinement, des jeunes sont entrés en emploi, dans plus de neuf Missions Locales sur dix. Ces entrées ont principalement eu lieu dans les secteurs en tension pendant la crise : services à la personne et à la collectivité, ainsi que dans le secteur du commerce, de la vente et de la grande distribution. Dans une moindre mesure, des jeunes ont pu entrer en emploi dans les secteurs de l’agriculture, des transports et de la logistique. À l’inverse, dans une Mission Locale sur cinq, de nombreux jeunes suivis ont indiqué avoir perdu un emploi. De manière générale, pendant le confinement, les Missions Locales ont eu moins de contacts avec les différents organismes de formation, les entreprises, et l’Éducation nationale. Les Missions Locales dans ce cas sont celles où les entrées en formation ont le plus souvent été suspendues : par exemple, 68 % des Missions Locales ayant eu moins de contact avec les CFA n’ont pas enregistré d’entrées en formation pour les jeunes suivis pendant la période, contre 51 % des autres Missions Locales.
Des communications à distance
"L’utilisation des moyens de communication à distance a favorisé le maintien du contact avec les jeunes pendant le confinement mais a également été source de difficultés", résume la Dares. Près de neuf Missions Locales sur dix utilisent davantage le téléphone ou les mails qu’avant la crise, et trois Missions Locales sur quatre utilisent davantage les SMS, les réseaux sociaux (ou autre messagerie), ou les appels vidéo. La fréquence du télétravail est corrélée à l’utilisation plus importante des moyens de communication à distance : ainsi, les Missions Locales qui ont plus de 80 % de leurs effectifs en télétravail sont aussi plus nombreuses à avoir intensifié leur utilisation des réseaux sociaux ainsi que des appels vidéos (82 % contre 62 % pour les autres).
Cette utilisation accrue des outils numériques a posé des difficultés dans deux Missions Locales sur trois, poursuit l’étude. Ces problèmes sont occasionnés plus souvent par des difficultés rencontrées par les jeunes (entre trois quarts et l’intégralité des Missions Locales qui déclarent des difficultés) que par des difficultés vécues par les conseillers (entre un tiers et la moitié des Missions Locales qui déclarent des difficultés). Les difficultés des jeunes sont majoritairement liées à l’accès à internet ou des difficultés d’usage des outils (illectronisme dans 76 % des Missions Locales). "Ces mêmes difficultés touchent de manière un peu moins importante les conseillers des Missions Locales", analyse la direction. Avec des problèmes d’équipement, de connexion ou de maîtrise des outils informatiques.
Plus de jeunes en difficultés
Près de six Missions Locales sur dix ont également indiqué des difficultés liées aux conditions dans lesquelles le jeune est confiné, notamment en lien avec des conditions de logements qui ne leur ont pas suffisamment permis de s’isoler en période de confinement.
43% des Missions Locales ont indiqué qu'une majorité de jeunes ont rencontré des problèmes financiers pendant le confinement.
(Dares, enquête flash Covid Missions Locales, mai 2020)
Les Missions Locales ont, en outre, dû trouver des solutions aux "problèmes, créés ou amplifiés par la situation de confinement". Pendant cette période, les jeunes suivis en Mission Locale se retrouvent souvent en situation de fragilité : dans 43 % des Missions Locales, une majorité des jeunes ont indiqué rencontrer des problèmes financiers depuis le 16 mars. Pour leur venir en aide, les Missions Locales ont massivement débloqué des allocations et ont mobilisé des aides d’urgence. Les jeunes suivis en Mission Locale souffrent également de mal-logement ou d’une dégradation du moral liée au confinement. Dans une moindre mesure, les jeunes ont rencontré des problèmes de santé ou des problèmes psychiatriques.
Pour l’avenir, les Missions Locales anticipent plutôt une "hausse à venir de leurs effectifs de jeunes accompagnés". 84 % d’entre elles l’attribuent en partie à des licenciements ou des difficultés à trouver ou retrouver un emploi, 55 % à l’augmentation du décrochage scolaire pendant le confinement, et un tiers à la rupture d’alternance ou la difficulté à trouver ou retrouver une alternance. "La quasi-totalité des Missions Locales anticipe que les jeunes rencontreront, dans les mois à venir, des problèmes financiers et d’accès à l’emploi", note la Dares.
Près de la moitié d’entre elles prévoient également pour les jeunes, dans les prochains mois, une augmentation des problèmes de santé, d’accès à des formations continues, ou de logement. 16 % des Missions Locales pensent que le retour à la normale aura lieu dans un mois ou deux, et 37 % pensent qu’il aura lieu au second semestre, tandis qu’une Mission Locale sur cinq estime que l’activité ne reviendra pas à la normale d’ici la fin de l’année.
Craintes pour les jeunes à l’avenir
Les Missions Locales anticipent des difficultés quant à leurs conditions d’activité pour la suite du déconfinement, notamment en termes de débouchés des jeunes et de disponibilité des salariés. Les mesures "barrière" à mettre en place sont également source d’inquiétude pour cette période : 36 % des Missions Locales anticipent des problèmes pour l’approvisionnement en équipements de protection individuelle, 44 % des problèmes d’espace liés à la taille de leurs locaux et 42 % d’autres difficultés à organiser l’activité de manière à respecter la distanciation sociale.
"Les Missions Locales expriment des craintes quant à l’avenir des jeunes suite à la crise, tant sur le plan de l’insertion professionnelle que sur le plan médicosocial", indique l’étude. Pour le premier point, elles souhaitent la mise en place "d’actions fortes" ciblant spécifiquement les jeunes (emplois aidés ou primes à l’embauche ciblées sont évoquées). Pour le second, elles indiquent le besoin "d’être épaulé par des acteurs spécialisés" dans le domaine sanitaire et social, les jeunes ayant particulièrement souffert lors de la crise. Les Missions Locales expriment, enfin, des craintes quant à leur financement l’an prochain.