Selon un rapport du Conseil économique, social et environnemental intitulé « Sécuriser le parcours d’insertion des jeunes », la France compte près de 2 millions des jeunes de 15 à 29 ans sans diplôme, sans formation et sans emploi, des « Neet » comme les appellent les Anglo-Saxons, « Not in education, employment or training ». Des jeunes sur le carreau, en clair. Ils représentent 25 % des places d’hébergement d’urgence en France. Et un jeune sur cinq vit sous le seuil de pauvreté.
Selon une note de janvier 2016 de France Stratégie, rattaché à Matignon, « les revenus primaires des jeunes se sont dégradés relativement à ceux des plus âgés, et la pauvreté monétaire jadis phénomène typique des âges élevés touche désormais deux fois et demie plus souvent les moins de 25 ans que les plus de 60.
Selon Pôle emploi, fin janvier, il y aurait 514 200 inscrits de moins de 25 ans sur un total de 3 552 600 chômeurs en catégorie A, soit 5 % de moins en un an. Reste que selon l’Insee, le taux de chômage des moins de 25 ans est plus élevé que la moyenne, atteignant 24 % au dernier trimestre 2015 (contre 10,3 % en moyenne).
Comme nous pouvons le constater, depuis les années 70, les plans se succèdent mais le problème demeure. Tout a commencé par le « pacte pour l’emploi des jeunes » de Raymond Barre en 1977, puis il y a eu les TUC de Laurent Fabius en 1984, les CES, les CIP d’Edouard Balladur en 1993, les Emplois Jeunes de Lionel Jospin en 1997, et les Emplois d’Avenir de François Hollande. Une armada de contrats qui n’a pas empêché le taux de chômage des jeunes de se maintenir depuis trente ans, entre 16% et 25% au gré de l’évolution de la courbe de croissance. Un bilan peu flatteur pour tous les responsables politiques qui se sont succédés car pour seule réponse ils ont tous donné de l’aspirine qui ne peut soigner ce cancer social qu’est le chômage des jeunes. Certes tout ceci est utile, cela soulage un temps, mais ces dispositifs restent toutefois loin d’offrir de vrais jobs durables à la jeunesse française.
Nous croyons fortement en l’alternance. Malheureusement cette voie n’est pas aussi développée qu’elle pourrait l’être. Tous les hommes politiques vantent les mérites de l’apprentissage, mais la réalité est que l’on assiste à son tassement. Depuis 2010, on a connu deux vagues de baisse des aides à l’embauche d’apprentis, et des modifications dans les contrats qui découragent les employeurs de petites entreprises.
Le réseau national des Missions Locales est le premier acteur dans l’insertion sociale et professionnelle des jeunes, en accompagnant chaque année 1 400 000 jeunes vers l'emploi et l'autonomie. Il assure une mission de délégation de service public.
En 2015, grâce à l’action des Missions Locales :
- 450 000 jeunes ont accédé à l’emploi
- 40 000 jeunes ont signé un contrat en alternance
- Près de 160 000 jeunes ont signé un contrat d’insertion dans la vie sociale
- 210 000 jeunes sont entrés en formation professionnelle (partenariat avec les Régions)
- 154 000 jeunes ont été accompagnés dans le cadre du Projet personnalisé d’accompagnement à l’emploi (Partenariat renforcé avec Pôle emploi)
Et par rapport aux annonces faites dernièrement par l’Etat en faveur des jeunes, j’exprime mon incompréhension face à la réduction des moyens pour accompagner les jeunes. Je cite d’ailleurs le Président de l’Union Nationale des Missions Locales « Nous avons de bons dispositifs, les résultats sont là, et on a rogné nos crédits d’accompagnement. Des baisses des dotations à hauteur de plus de 60 millions sur deux ans pour l’ensemble du réseau. Ce qui a entraîné un malaise au sein des Missions Locales » .
Le malaise financier est réel. Même pour les Missions Locales gérées au plus serré, comme la notre.
Un malaise financier concomitant avec l’arrivée en 2016 de la Mutuelle obligatoire. Et bientôt la négociation annuelle du point des conseillers prévue en octobre mais qui a été avancée en juin, suite à l’annonce gouvernementale sur l’augmentation du point dans la fonction publique. Cela donne des idées. Les syndicats de salariés réclament une augmentation de 30 centimes du point, ce qui représente 27 millions d’euros au niveau national, et cela pose un réel problème budgétaire. Nous sommes dans un cadre associatif et l’arbitrage à faire entre l’emploi et les salaires est kafkaïen.
Enfin la dernière bonne nouvelle, l’Etat ne versera pas la totalité des subventions Garantie Jeune aux Missions Locales qui l’expérimentent, en raison de la complexité administrative de ce programme européen. En effet, la Direction Centrale a omis de communiquer aux Missions Locales, via les directives, une partie des pièces justificatives que nous devions fournir sur 2015, et que nous sommes donc incapables de donner à postériori. Sans ces pièces, pas de versement de solde totale de la subvention. En claire, l’administration centrale a fait une bourde, et c’est aux Missions Locales d’en assumer le risque financier.
Ce rapport moral n’est pas une complainte, mais une vision réaliste de ce que nous vivons et il est de notre responsabilité de vous communiquer la vraie situation de l’emploi des jeunes, de nos difficultés et des dysfonctionnements de l’administration qui ont des impacts financiers non négligeables.
Le mercredi 27 avril dernier, Madame le Ministre du Travail écrivait au Président de l’Union Nationale : « Au 1er janvier 2017, tout jeune en situation de précarité, sans emploi ou sans formation, devra pouvoir demander à entrer dans la garantie jeunes dans toutes les missions locales »
Le jeudi 28 avril dernier, le Préfet de Région demandaient aux Président des Missions Locales d’Auvergne Rhône Alpes, « de faire plus d’Emploi d’Avenir, plus de Service Civique, plus d’apprentissage. »
Les Missions Locales se sont toujours adaptées. Mais faire plus avec moins de ressource et moins de personnel, se sera difficile, et il nous faudra revoir les objectifs à la baisse. CQFD
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