Philippe LABBE
Au su de l’amendement scandaleux voté de la Loi NOTRe (Nouvelle Organisation Territoriale de la République) ouvrant aux régions volontaires l’expérimentation du pilotage régionale du SPE hors Pole Emploi et donc « régionalisant » les Missions locales, que dire ? Nous avions déjà eu une sérieuse alerte en 2012 via les velléités de l’Association des Régions de France (ARF) d’assumer la compétence emploi avec, donc, dans le panier les Missions locales. Que dire ? Rien de plus que de rappeler…
Tout d’abord, le rapport de l’IGAS (Inspection générale des affaires sociales), Le service public de l’orientation : état des lieux et perspectives dans le cadre de la prochaine réforme de décentralisation, daté de janvier 2013. Quelques extraits…
« Les missions locales étant dotées d’attributions propres, confortées depuis leur création, et d’un financement partagé, la suppression de ces structures autonomes et leur intégration soit dans le cadre de « missions régionales », soit au sein des services des régions, n’est pas un scénario recommandé par la présente mission, pour plusieurs raisons :
– les attributions des missions locales ont intégré, comme on l’a décrit plus haut, une composante croissante d’accompagnement et d’intermédiation vers l’emploi, dans le cadre du service public de l’emploi ; une régionalisation (au sens de dévolution des missions locales aux régions) ne serait pour cette raison pas adaptée à l’évolution du rôle du réseau ;
– en outre, cela entraînerait un risque élevé de désengagement financier et politique des collectivités infrarégionales et déstabiliserait un réseau fortement sollicité pour l’insertion des jeunes, dans la conjoncture difficile actuelle. » (p. 90)
« {…} les régions apportent comme on l’a vu une contribution financière trois fois moindre que l’État (17% contre 47 %). Cette disproportion de financement, à elle seule, n’apparaît pas compatible avec le pilotage futur des missions locales par les régions en tant que chef de file du futur SPO. De plus, elle ne correspond pas à l’activité déployée par les missions locales telle qu’elle est retracée dans l’application informatique Parcours 3. » (pp. 90-91)
Recommandation 14 : Prévoir des conventions pluriannuelles d’objectifs et de moyens tripartites entre l’État, les régions et les unions régionales des missions locales ainsi que, le cas échéant, d’autres financeurs territoriaux. Décliner ce conventionnement au niveau de chaque mission locale. (p. 93) »
On aurait même pu remonter avant avec le rapport de l’IGF (Inspection générale des finances) de 2010 sur les Missions locales : « Les conclusions de la mission {de l’IGF} tendent à conforter le modèle. En effet, sans résoudre la question du chômage des jeunes, il produit des résultats qui témoignent d’un réel potentiel pour des coûts inférieurs à ceux des dispositifs comparables :
- Les taux de couverture de la population jeune sont élevés ;
- Les missions locales remplissent largement les objectifs que l’État leur fixe à travers les conventions pluriannuelles qu’il conclut avec chacune d’elles… »
« Ces performances tiennent au caractère doublement intégrateur des missions locales, qui fait leur originalité :
- intégrateur de moyens : cofinancées par l’État et les collectivités locales, les missions locales font la synthèse des forces économiques, associatives et sociales locales pour mettre en œuvre en direction des jeunes les politiques d’insertion dont elles sont l’instrument ;
- intégrateur de services : les missions locales s’attachent à intégrer l’ensemble des services locaux pour fournir aux jeunes un accompagnement global (emploi, formation, mais aussi logement, santé, mobilité, voire culture ou sport), en entretenant des relations partenariales avec tous les acteurs locaux de l’insertion des jeunes.
La force de ce modèle repose largement sur l’autonomie des structures, qui favorise leur dynamisme et leur capacité de synthèse. »
Conclusion : ça marche trop bien, il faut changer !
En 2012, faisant suite à la note de l’ARF « Nouvel acte de décentralisation. Volet orientation/éducation/formation professionnelle/emploi » (5 juin 2012), j’écrivais une note « Les Missions locales dans l’œil de l’Acte III. Hypothèse pour une décentralisation équilibrée » et invitais le réseau à se mobiliser promptement… ce qui fut fait le 12 juin à Paris.
Une fois de plus, la réaction doit être rapide et massive, comme, par exemple, l’éditorial clair, sans langue de bois, du SYNAMI[1] ou l’article de l’ami Michel ABHERVE[2]. Pour contribuer à cette réaction et étayer les argumentaires, je ne peux, à ce stade et à mon niveau, que re-proposer mon texte de juin… malheureusement toujours d’actualité ! Compte-tenu de sa longueur – 28 pages -, je n’en reprends ici que des extraits. J’invite en tout cas les professionnels à débattre rapidement de cet événement.
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