► Pourquoi s’acharner à vouloir réformer le lycée ?
Même si le lycée français fonctionne plutôt pas trop mal, il souffre de plusieurs maux pénalisants pour nos enfants.
Les résultats ne sont pas à la hauteur de nos attentes : 35.000 jeunes quittent chaque année le lycée sans le bac et 80.000 bacheliers n’ont aucun diplôme de l’enseignement supérieur !
Et derrière ces chiffres, se cache une autre réalité, celle d’un ascenseur social en panne, puisque les enfants d’ouvriers ont deux fois moins de chances d’accéder à l’enseignement supérieur que les enfants issus de classes aisées et qu’ils ont cinq fois moins de chances d’accéder à des classes préparatoires.
On note aussi une crise de la formation, notamment en langue et en économie ! La majorité des lycéens sortent du lycée sans maîtriser de langue étrangère et la France se classe 69/109 au test qui permet de postuler aux universités américaines
Enfin, notre système d’orientation ne marche pas, il est trop rigide, trop déconnecté du monde professionnel ! On parle à nos enfants de cursus, mais jamais de métiers ! Résultat, la série scientifique est considérée comme l’unique voie royale où se retrouvent tous les meilleurs élèves même ceux qui n’aiment pas les sciences. Et parallèlement les voies technologiques et professionnelles sont méprisées.
► Certains ont critiqué une réforme jugée parcellaire, cosmétique, manquant d’ambition et de moyens…
Souvent quand on entend parler le PS ou certains syndicats d’ambition pour l’éducation nationale, il faut traduire simplement par plus de postes, plus d’argent et surtout immobilisme… C’est-à-dire beaucoup de dépenses, mais peu de volonté de changer sur le fond.
Nicolas Sarkozy a proposé plusieurs pistes pour réformer le lycée :
1) Révolutionner le système d’orientation : l’orientation doit devenir progressive et réversible avec un droit à l'erreur. L’idée c’est de permettre aux élèves qui le souhaitent de se réorienter, grâce à des stages passerelles de remise à niveau qui leur permettront d'éviter le redoublement ou de changer de section en cours de route. Soit pendant les vacances, soit pendant la scolarité. Le redoublement va ainsi devenir l'exception.
Parallèlement, les lycées doivent nouer plus de contacts avec l’enseignement supérieur, avec le monde du travail. Quelle filière mène à quel métier, quels sont les débouchés, les possibilités d’évolution… Autant de questions auxquelles les lycéens doivent trouver des réponses. Cela suppose des stages d’observation, pour les élèves, comme pour les professeurs.
Enfin, la première doit devenir plus générale et la terminale plus spécialisée.
2) « Casser » la hiérarchie des voies et des séries : il faut sortir de cette logique « hors de la filière scientifique point de salut ». Toutes les filières doivent avoir des débouchés propres et valorisés. Nous devons rénover en priorité la filière Sciences et Technologies Industrielles (STI) qui permet de déboucher sur les métiers d'ingénieurs et de techniciens supérieurs dont nous avons besoin. Pour cela il faut lui donner des débouchés dans le supérieur en réservant des places pour les STI dans les IUT et les BTS et multiplier les possibilités d’intégrer les écoles d’ingénieur.
Il s’agit aussi de sauver la série Littéraire, en créant un enseignement de langues et de civilisations étrangères, afin de faire d’en faire une filière littéraire internationale, en introduisant de nouvelles matières, comme le droit et en créant un enseignement culturel et artistique de haut niveau.
3) Mettre en place dans les lycées un accompagnement personnalisé pour tous les élèves : dès la rentrée prochaine, tous les élèves bénéficieront d'une aide de deux heures par semaine en petits groupes, soit pour du soutien, pour ceux qui sont en difficulté, soit pour l’approfondissement, pour les meilleurs, soit pour faire un choix d’orientation.
4) Les lycées doivent devenir au moins bilingues : il faut donc privilégier davantage l'oral, organiser des séjours linguistiques, faire des cours en langue étrangères (pourquoi pas en histoire, sciences, ou EPS ?) et faire des épreuves orales pour la LV1 au bac au lieu d’épreuves écrites.
►Le Président a parlé d’histoire de l’art, de ciné club, d’opéras en direct, de déléguer des compétences aux élèves… le lycée ne s’éloigne-t-il pas de ses objectifs fondamentaux ?
C’est bien vite caricaturer le plan pour les lycées que de le limiter à l’instauration de ciné-clubs dans les établissements…
Le plan pour les lycées a pour première priorité de renforcer l’employabilité future des lycéens :
§ en permettant une meilleure orientation qui n’enferme pas les lycéens dans des impasses sans débouchés, mais les mène vers l’apprentissage d’un métier
§ en réhabilitant des filières jusqu’à présent déconsidérées qui vont à nouveau rimer avec réussite
§ en favorisant une meilleure interface entre les lycées –enseignants et élèves- et le monde professionnel, notamment en développant les stages
§ en poussant les Français à apprendre des langues étrangères
Insister sur l’apprentissage de la culture n’a rien d’incompatible avec la professionnalisation, au contraire culture et employabilité peuvent être complémentaires :
§ la France possède un patrimoine culturel unique, nous aurions tort de ne pas plus utiliser ce trésor inestimable qui est sous nos yeux pour éduquer les lycées
§ la culture est un héritage commun, l’un des socles du vivre ensemble d’une nation, qui doit se transmettre dès le lycée
§ la culture véhicule créativité, ouverture d’esprit et curiosité intellectuelle, autant de qualités indispensables pour occuper un emploi
§ la culture est aussi une industrie à part entière en France qui possède des débouchés propres auxquels nous devons former certains lycéens
► L’expérimentation de la cagnotte collective dans quelques lycées fait-elle partie du plan lycées ?
Rappel : Depuis la rentrée, trois lycées professionnels de l’académie de Créteil ont mis en place l’attribution d’une cagnotte collective pour les élèves en fonction de leur assiduité en cours.
D’abord une mise au point : il n’est pas une seule seconde question de payer les élèves pour qu’ils aillent en cours ! L’école est une chance et chacun doit en avoir conscience.
Mais, dans le même temps, il n’est pas acceptable que l’absentéisme touche en moyenne 20% des élèves de lycées professionnels. C’est l’un des facteurs qui explique que nous avons 100 000 « décrocheurs » par an qui quittent l’école sans diplôme.
Ce problème de l’absentéisme n’est pas nouveau ! Depuis de nombreuses années, les gouvernements tentent d’y trouver un remède et invitent les établissements scolaires à mettre en place différentes initiatives : cela va des remises de prix à la suspension des allocations familiales en passant par l’alerte des parents par mail ou SMS. Nous avons aussi créé 5000 postes de médiateurs de réussite scolaire, répartis dans les 100 lycées où l’absentéisme est le plus fort.
Cette initiative du rectorat de Créteil s’inscrit dans cette logique et peut mériter d’être expérimentée. Le mécanisme repose sur la motivation collective : les élèves doivent tous être présents en cours et bien se comporter pour bénéficier du financement et ils doivent ensuite construire ensemble un projet. C’est plutôt positif en terme de cohésion et de responsabilisation. Cet argent n’est en aucun cas un salaire, il financera un projet éducatif défini avec les élèves : il pourra permettre, par exemple, de réaliser un voyage scolaire ou de financer l’achat de matériel informatique. Si l’idée est de dire la réalisation de vos projets passe par le travail, le sérieux et l’investissement professionnel, alors cela est en ligne avec nos convictions profondes.
Il faudra évidemment évaluer ce dispositif et voir si c’est concluant en terme de lutte contre l’absentéisme. Ce dispositif sera à l’essai pendant 1 an et pourra être étendu à 30 établissements en 2010.