Intervention radiotélévisée à l’issue de la réunion avec les partenaires sociaux du Président de la République Nicolas Sarkozy, le 18/02/09 - Palais de l'Elysée
Mes chers compatriotes,
Nous sommes au milieu de la crise. Les chiffres, nous les connaissons tous. Ils sont inquiétants pour les mois à venir. Ils sont pires ailleurs. Ce n’est pas une consolation. Mais la France résiste plutôt mieux que beaucoup d’autres. Ce qui me conduit à penser que la France a tout pour s’en sortir plus vite, pour en sortir plus forte, à la condition de ne pas refaire les erreurs du passé. Ces erreurs on les connaît. Ce sont celles d’une politique de facilité qui sacrifierait l’avenir au présent, qui conduirait à la banqueroute, qui ruinerait la compétitivité de notre pays.
Nous sortirons de la crise en modernisant la France, en misant tout sur l’investissement, sur la réforme, sur le travail, pas en embauchant davantage de fonctionnaires ou en rétablissant l’autorisation administrative de licenciement.
Nous ne nous en sortirons pas non plus en augmentant massivement le SMIC qui concerne à peine 1 salarié sur 10 parce que dans les circonstances actuelles ce serait aggraver les difficultés déjà grandes de beaucoup de nos petites entreprises qui seraient conduites à licencier et ce serait exclure du marché du travail un grand nombre de travailleurs peu qualifiés.
Alors cet après-midi j’ai rencontré les représentants des organisations syndicales et du patronat. Je leur ai dit ma conviction qu’au coeur de cette crise mondiale sans précédent, dont personne ne peut prévoir jusqu’où elle ira ni jusqu’à quand elle durera, qu’il était essentiel de garder notre sang-froid, je leur ai dit ma détermination à aborder cette période difficile dans un esprit de responsabilité et pardessus tout de justice.
L’esprit de justice, c’est de tout faire pour que la crise ne fasse pas souffrir davantage les plus fragiles d’entre nous et ne fragilise pas ceux qui travaillent dur pour faire vivre leur famille.
Alors j’ai écouté les partenaires sociaux qui m’ont parlé des inquiétudes, des difficultés, des souffrances qu’ils perçoivent dans notre société. Nous avons discuté des attentes de chacun et des réponses qui pourraient leur être apportées. Avec le Premier ministre nous avons mûrement réfléchi et avec le Gouvernement, nous avons donc pris les décisions suivantes.
Désormais les salariés au chômage partiel seront indemnisés jusqu’à 75% de leur salaire brut et le Gouvernement va demander aux banques d’assouplir leurs échéanciers d’emprunt pour leur permettre de traverser cette période difficile.
Les chômeurs qui ne peuvent pas bénéficier de l’assurance chômage parce qu’ils n’ont pas assez cotisé en tout cas assez longtemps et qui ont travaillé au moins pendant deux mois, ce qui est le cas de beaucoup de jeunes, recevront une prime exceptionnelle de 500 euros et les entreprises qui bénéficient des crédits du plan de relance s’engageront à former et à recruter des jeunes.
Un fonds d’investissement social dont la dotation pourra aller jusqu’à 3 Mds d’euros pour l’emploi et pour la formation professionnelle va être créé.
Les dirigeants des entreprises qui recourent au chômage partiel ou au licenciement économique devront s’engager à renoncer à leurs bonus. C’est un élément de la justice.
Quatre millions de familles dont les revenus se situent dans la première tranche d’imposition verront cette année leur impôt sur le revenu réduit des deux tiers. Ce qui concrètement veut dire que ceux qui ont déjà payé leur premier tiers provisionnel ne paieront plus rien jusqu’à la fin de l’année. Pour une famille avec trois enfants, l’économie d’impôt atteindra en moyenne 400 euros. Mon devoir est de soutenir les classes moyennes. Deux millions de foyers supplémentaires dont les revenus atteignent la deuxième tranche verront aussi leur impôt diminuer.
Trois millions de familles qui bénéficient de l’allocation de rentrée scolaire parce qu’elles ont des enfants de plus de six ans recevront dès le mois de juin une prime de 150 euros.
660 000 ménages bénéficiaires de l’allocation d’autonomie à domicile, 470 000 familles ayant de jeunes enfants, 140 000 familles ayant un enfant handicapé, ainsi que les chômeurs qui retrouvent un travail et qui ont besoin parce qu’ils ont retrouvé un travail de faire garder leurs enfants recevront chacun des bons d’achat de services à la personne pour un montant de 200 euros, ce qui donnera du travail et créera des emplois de service.
Au total c’est donc un effort supplémentaire de 2,6 milliards d’euros par rapport à ce qui a déjà été fait que l’Etat va consentir pour soutenir ceux que la crise met le plus en difficulté.
Mais au-delà de ces mesures de justice, et la justice ce doit être une priorité en ce moment, les réformes doivent continuer pour permettre à notre pays de sortir le plus vite et le mieux possible de la crise. Je pense d’abord à la nécessité de mener jusqu’à leurs termes la réforme de l’Hôpital, celle des lycées, des Universités, de la Recherche, de la formation professionnelle, parce que ces réformes conditionnent en grande partie notre avenir et l’avenir de l’emploi de vos enfants. Je pense aussi à la nécessité de poursuivre la réforme de notre Etat devenu trop lourd, trop coûteux, qui peine à remplir ses missions les plus essentielles.
Je n’oublie pas bien sûr ceux des fonctionnaires qui exercent un métier qui est devenu plus difficile et qui, s’ils ne sont pas menacés par le chômage, ont des conditions de travail qui se sont dégradées au cours des dernières années, des rémunérations souvent trop basses et ne sont pas assez considérés. Je pense aux personnels hospitaliers, aux enseignants, à tous ceux dont les mérites ne sont pas assez reconnus, dont les efforts ne sont pas assez récompensés.
Partout, il faut continuer à revaloriser le travail qui est la clé de tout et il faut inscrire cette perspective dans le grand chantier de la moralisation indispensable et de la refondation tellement nécessaire du capitalisme. Remettre la valeur travail au cœur de notre économie est une priorité absolue. On ne peut pas y parvenir si les salariés sont oubliés dans le partage de la valeur ajoutée et des profits. Nous devons nous réjouir que nos grandes entreprises gagnent de l’argent. Mais quand les entreprises du CAC 40 prévoient de distribuer près de cinquante milliards d’euros de dividendes pour 2008, il est normal et c’est mon rôle de chef de l’Etat de le dire qu’une part revienne aux salariés, parce que ces salariés ont permis par leur travail que leurs entreprises deviennent aussi rentables. Je le dis comme je le pense. Le statu quo n’est pas tenable.
Cette question du partage sera débattue entre les partenaires sociaux et si des progrès ne sont pas réalisés rapidement, l’Etat prendra ses responsabilités.
Mes chers compatriotes, La crise nous devons l’affronter tous ensemble.
Plus que jamais le dialogue social est nécessaire. Désormais les organisations syndicales seront associées aux opérations de restructurations dans les entreprises. Elles participeront aussi au contrôle des aides publiques. Un décret rendra obligatoire la consultation du comité d’entreprise aussitôt qu’une aide publique sera attribuée. C’est une transparence que nous devons aux contribuables.
De nombreux sujets vont faire l’objet dans les semaines qui viennent d’une concertation approfondie.
Je pense aux retraites complémentaires, au dialogue social dans les très petites entreprises, au rôle des représentants des salariés dans l’entreprise, mais aussi à l’égalité de rémunération entre hommes et femmes, ou encore à la nécessaire autonomie des jeunes.
Mes chers compatriotes, Vous l’avez compris, au milieu des difficultés que nous traversons, je vous propose le seul chemin qui vaille, celui de l’effort, celui de la justice, celui du refus de la facilité. Je vous propose de regarder vers l’avenir et non vers le passé.
Cette crise s’achèvera. Nous recueillerons alors les fruits de nos efforts. J’ai confiance dans les atouts de notre pays. J’ai confiance dans son avenir.
J’ai été élu pour prendre des décisions, pour assumer les difficultés et pour proposer des solutions.
Aujourd’hui c’était ma réponse aux conséquences sociales de la crise. Dès demain je recevrai les élus d’Outre mer pour répondre à l’angoisse, à l’inquiétude et à une certaine forme de désespérance de nos compatriotes des territoires d’Outre mer.
Mes chers compatriotes,
Vive la République,
Vive la France.
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